Élisabeth Borne : l’architecte inflexible quitte Matignon avec le sentiment du “devoir accompli”

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Élisabeth Borne, Première ministre, jete l’éponge après 20 mois de service, une période marquée par des turbulences politiques exacerbées par l’absence de majorité à l’Assemblée nationale. Femme discrète, parfois austère, arborant souvent une cigarette électronique, elle clame un “devoir accompli” malgré les difficultés. “J’ai été passionnée par cette mission, guidée par le souci constant, que nous partageons, d’aboutir à des résultats rapides et tangibles pour nos concitoyens”, exprime-t-elle dans sa lettre de démission.

La connexion manquante avec les Français

Bien que la deuxième femme à occuper ce poste, elle a eu du mal à établir une connexion avec les citoyennes et citoyens. Sa gestion sans fioritures, voire son manque d’empathie, l’ont éloignée de l’opinion publique. Les dissensions avec le président ont ajouté à sa fragilité politique. La rue de Varenne, où elle a planté un chêne vert symbolique à son arrivée, a été le théâtre de plusieurs crises, notamment avec une vingtaine de recours au 49.3 pour contourner cette absence de majorité.

La politique de la contrainte

“Une majorité relative n’est pas, et ne sera pas, le synonyme d’une action relative”, affirmait-elle dans son discours de politique générale en juillet 2022. Malgré des désaccords avec le président, elle a suivi scrupuleusement sa feuille de route, déclenchant des 49.3 pour des textes budgétaires, dont la réforme des retraites, échappant de justesse à la censure. La loi sur l’immigration, rejetée puis adoptée avec le soutien de la droite et de l’extrême droite, a fracturé sa majorité, menant à la démission du ministre de la Santé, Aurélien Rousseau.

Faiblesse politique ou manque de lucidité ?

De nombreux membres de la majorité reconnaissent son “sérieux”, mais pointent sa “faiblesse politique”. Un proche d’Emmanuel Macron évoque un “procès en manque de lucidité”. Il relate qu’elle croyait longtemps que Marine Le Pen ne voterait pas en faveur du texte sur l’immigration. “On ne peut pas lui faire un procès en déloyauté, mais un procès en manque de lucidité”, ajoute-t-il.

Du génie aux tragédies familiales

Ingénieure et préfète, Élisabeth Borne, née Bornstein en 1961, a surmonté des tragédies familiales, dont le suicide de son père à l’âge de 11 ans. Plongée dans les maths, elle a été admise à Polytechnique comme “pupille de la nation”. Sa carrière politique l’a menée à la présidence de la RATP, aux Transports, à l’Écologie, puis au Travail. Elle a géré la réforme de la SNCF et la loi sur les mobilités aux Transports, la réforme de l’assurance chômage au Travail, et la planification écologique complète et robuste en tant que Première ministre.

La démission inévitable

La démission d’Élisabeth Borne a été acceptée par Emmanuel Macron, qui la remercie pour son travail “exemplaire”. Cependant, les dissensions entre eux étaient notoires depuis sa nomination en mai 2022. La gestion des affaires courantes sera assurée jusqu’à la nomination du nouveau gouvernement, sans précisions sur le calendrier des nominations. Gabriel Attal est en pole position pour la remplacer.

Le bilan d’une “Première ministre en même temps”

Malgré les obstacles, Élisabeth Borne peut se targuer d’une soixantaine de textes adoptés sans recours au 49.3, dont 24 projets de loi. Son bilan inclut des réformes majeures, comme celle des retraites et de l’immigration. “On verra l’empreinte d’Élisabeth Borne dans la vie du pays”, souligne l’entourage d’Emmanuel Macron, mettant en avant son habileté à trouver des compromis dans une majorité relative. Deuxième femme à endosser le rôle de cheffe du gouvernement Français, après Edith Cression il y a trente ans, elle était particulièrement scruter par les autres membres de l’exécutif.

Un départ à contrecœur

Dans sa lettre de démission, Élisabeth Borne laisse entendre qu’elle démissionne à contrecoeur, à la demande du président. Elle estime qu’il est “plus que jamais nécessaire de poursuivre les réformes” pour bâtir une France plus forte et plus juste. La Première ministre sortante s’est aussi dite “fière que la France soit désormais dotée d’une planification écologique complète et robuste.” Le président doit dévoiler ses intentions lors d’un “rendez-vous avec la Nation” en janvier. Élisabeth Borne quitte la scène politique, avec le sens du “devoir accompli.”

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