À Achères, dans les Yvelines, un programme d’équithérapie aide des femmes victimes de violences sexuelles à se reconstruire. Ce parcours thérapeutique est unique en son genre. Il se base sur la relation homme-cheval pour faire émerger des traumatismes enfouis et amorcer un travail de guérison.
Des chevaux pour rouvrir la voie de la mémoire
Depuis neuf ans, l’association Stop aux Violences Sexuelles 75-78 propose un accompagnement original. Dans un centre équestre privatisé, en pleine nature, elle suivent des séances thérapeutiques originales. Chaque vendredi, sept femmes participent à des séances encadrées par des thérapeutes spécialisés. Elles commencent par un cercle de parole, avant de rejoindre les chevaux pour des exercices pratiques, rebaptisés “expériences”. Brosser, guider, parfois monter – en amazone si nécessaire – devient un moyen d’explorer des sensations enfouies. « Le cheval est une éponge à émotions. Il capte l’état intérieur de la personne », explique Anne Kurz-Van der Hoeven, thérapeute en médiation équine.
« Le cheval m’a reconnectée à la petite fille de sept ans que j’avais oubliée, celle qui a subi plusieurs abus. » Laurène explique que l’équithérapie lui a provoqué un déclic profond. Les fondatrices du programme affirment que l’équithérapie peut provoquer des levées d’amnésie liées aux traumatismes. En redonnant une place au corps, la thérapie permet de faire resurgir des souvenirs souvent absents en psychothérapie classique. Certaines femmes retrouvent des tensions physiques inexpliquées. « Je ressens des crispations dans mon corps au contact du cheval, c’est inédit pour moi », se confie Laëtitia
Un cadre thérapeutique hors norme et structuré
Chaque séance se construit autour d’un thème : poser ses limites, trouver l’équilibre, instaurer la confiance, s’engager… Ce fil conducteur suit une progression pensée pour accompagner les participantes dans leur reconstruction. En parallèle, un suivi individuel avec un thérapeute est exigé, pour consolider les avancées et préparer la suite. « Le cadre collectif permet des prises de conscience, mais c’est l’accompagnement individuel qui ancre les transformations », souligne le Dr Pascale Bouthillon, psychiatre et cofondatrice du programme.
L’équipe mobilisée est pluridisciplinaire. Elle est composée d’une psychologue clinicienne, kiné-ostéopathe. De plus, une pair-aidante – une femme ayant elle-même été victime – est présent en soutien. Même un chien thérapeute, Taksy, observent les séances en silence. Malgré un coût de 140 euros par séance, des aides sont proposées selon les revenus. De plus, le ministère des Sports apporte aussi un soutien financier. Les effets constatés encouragent les initiateurs du projet : « Le changement est colossal. L’ancrage dans le corps et le lien avec l’animal permettent d’aller à la racine du trauma », affirme le Dr Bouthillon. Une thèse de médecine publiée en 2022 à l’Université de Caen confirme des résultats prometteurs. Le programme est bénéfique pour les personnes souffrant de stress post-traumatique.