Le Wyoming, premier Etat américain à interdire la pilule abortive

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La rédaction

Le Wyoming est devenu, vendredi 17 mars 2023, le premier Etat américain à interdire la pilule abortive. Une nouvelle victoire pour les conservateurs qui entendent faire reculer l’accès à l’avortement aux Etats-Unis.

Alors que de nombreux opposants à l’avortement cherchent à faire interdire la pilule abortive sur l’ensemble du territoire américain, le gouverneur du Wyoming, Mark Gordon, a appelé à aller plus loin et inscrire une interdiction totale de l’avortement dans la constitution de cet Etat et de la soumettre au vote des électeurs. M. Gordon a déclaré qu’il n’entendait pas reculer dans sa lutte contre l’avortement. “Je crois que toute vie est sacrée et que chaque individu, y compris les enfants à naître, doit être traité avec dignité et compassion”, a déclaré M. Gordon vendredi soir.

Pour rappel, après la décision l’an dernier de la Cour suprême d’enterrer le droit à l’avortement au niveau fédéral, une quinzaine d’Etats ont décidé de bannir toutes les interruptions de grossesse sur leur sol.

Au Texas, une décision similaire est attendue

Une décision est également attendue prochainement au tribunal d’Amarillo au Texas où un juge fédéral ultraconservateur, Matthew Kacsmaryk, doit statuer sur une éventuelle interdiction au niveau fédéral de la mifépristone (RU 486). Cette pilule, la plus largement utilisée pour les interruptions médicamenteuses de grossesse, a été autorisée en 2000 par l’Agence américaine du médicament (FDA). Matthew Kacsmaryk, pourrait ordonner qu’elle soit retirée du marché dans tout le pays.

Les législateurs texans examinent également une proposition qui, non seulement interdirait les pilules abortives, mais exigerait également des fournisseurs d’Internet de l’État qu’ils bloquent l’accès aux sites où ces pilules sont vendues par correspondance.

Depuis que la Cour suprême des Etats-Unis a rendu, en juin l’an passé, sa liberté de légiférer à chaque Etat, une quinzaine d’entre eux ont limité l’accès à la mifépristone en exigeant qu’un médecin la fournisse.

Des réseaux clandestins pour l’accès à la pilule abortive

Le documentaire “Plan C” suit l’association du même nom fondée en 2015 et retrace les péripéties vécues pendant trois ans par des femmes engagées pour le droit à l’avortement entre 2019 et 2022. D’un côté, la pandémie leur a permis de peu à peu lancer la démocratisation des téléconsultations et l’envoi par la poste de ces pilules. De l’autre, l’avortement, et donc la pilule abortive, sont devenus illégaux dans une dizaine d’Etats. “Malheureusement, les anti-avortements ont en partie gagné”, a déclaré la réalisatrice du documentaire, Tracy Droz Tragos. “Nous n’avons pas encore touché le fond aux Etats-Unis”, assure-t-elle. “Mais de plus en plus de gens entrent en résistance et font en sorte qu’il y ait un accès” aux pilules abortives, dit-elle. “Donc il y a une alternative, il y a une réponse possible.”

Un réseau sous-terrain 

Le plan A, c’est la contraception. Le plan B, c’est pilule du lendemain. Et puis, en cas de grossesse non désirée, le plan C : l’avortement médicamenteux. Les femmes engagées ont commencé par tester les pilules pouvant être achetées sur le marché noir, sur internet, pour vérifier qu’il s’agit du vrai produit. Si oui, elles les répertoriaient sur leur site.

Puis, durant la pandémie, face aux difficultés pour trouver ces pilules, elles passent un appel pour recruter des médecins acceptant de les prescrire via télémédecine, et de les envoyer par la poste aux patientes. “Après avoir parlé à environ 150 médecins, on a fini avec cinq”, à la mobilisation “héroïque“, raconte Elisa Wells. Plan C les aide à couvrir les coûts d’installation d’un service de téléconsultation, ou encore de licences médicales pour exercer dans plusieurs Etats.

Ces femmes médecins opèrent alors malgré un flou juridique, jusqu’à ce que l’Agence américaine des médicaments (FDA) ne clarifie la situation : oui, les pilules peuvent bien être postées. De nombreux services de téléconsultations naissent alors.

Mais en juin 2022, séisme dans le pays : la Cour suprême rend aux Etats leur liberté de légiférer sur l’avortement, qui devient illégal dans une vaste partie du pays. Alors que l’accès est peu à peu drastiquement restreint, un fournisseur accepte de continuer à poster les pilules vers les Etats républicains, notamment le Texas. Un réseau sous-terrain s’organise. “C’est comme faire tourner un cartel de drogue, mais pour aider les gens”, déclare une des femmes anonymes du documentaire.

Dans le documentaire, les détails de fonctionnement ne sont pas révélés, les visages sont floutés, les voix déformées, les pistes brouillées … “J’espère que nous en avons fait assez, et que ces gens resteront en sécurité”, dit la réalisatrice, en regrettant qu’un médicament autorisé depuis plus de 20 ans aux Etats-Unis se retrouve à susciter de telles opérations clandestines. “C’est une tragédie”, dit-elle.

Trouver une plateforme qui accepte de diffuser le documentaire se révèle aujourd’hui compliqué.

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