Mama Antula : la célèbre jésuite pionnière des droits humains devient la première sainte Argentine

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La Basilique Saint-Pierre de Rome va canoniser la jésuite Mama Antula (1730-1799). Elle deviendra ainsi la première sainte argentine. Considérée comme une pionnière des droits humains, Mama Antula était une laïque jésuite défenseuse des Indiens dans une Argentine qui, au 18e siècle, n’était encore qu’un vice-royaume de la royauté espagnole.

Mama Antula, déjà béatifiée en 2016

L’Argentine qui comptait déjà trois saints masculins, voit sa première sainte qui sera prochainement canonisée à la Basilique Saint-Pierre de Rome, lors d’une messe en présence de deux compatriotes: le pape François, ancien archevêque de Buenos Aires, et le président Javier Milei.

Maria Antonia de Paz y Figueroa, plus connue sous le nom de Mama Antula, est devenue la première sainte argentine.

En 2016, Mama Antula était déjà béatifiée. Aujourd’hui, sa canonisation lui est dûe suite à deux miracles qui lui ont été attribués : la guérison d’une religieuse en 1905 et d’un enseignant victime d’un grave AVC en 2017.

Cintia Suarez, co-auteure d’une biographie de Mama Antula, décrit “une vie
d’engagement auprès des exclus qu’étaient les Indiens, les esclaves, les mulâtres, les paysans”, tous “considérés comme des choses à l’époque coloniale”.

A 15 ans, elle annonce qu’ “elle ne sera ni religieuse ni épouse”

De son vrai nom, Maria Antonia de Paz y Figueroa, mieux connue sous le nom affectueux de “Mama Antula”, est née dans une famille aisée à Villa Silipica, à 1.100 km au nord de Buenos Aires. Dès son adolescence, éduquée chez les jésuites, elle se rebelle contre les normes restrictives de l’époque.

A 15 ans, âge où les jeunes filles se mariaient ou entraient au couvent, elle se
rebelle et lance à son père qu’ “elle ne sera ni religieuse, ni épouse”, raconte Cintia
Suarez. Attirée par l’ouverture intellectuelle offerte par les Jésuites, sa décision est prise : elle sera une laïque consacrée jésuite.

4000 km à pieds pour diffuser le message jésuite

Elle quitte sa famille. “Mama Antula entame une vie communautaire et itinérante dans les provinces du nord, avec d’autres femmes consacrées, au service des pauvres, des orphelins, des malades”, souligne Cintia Suarez.

Elle parcourt plus de 4.000 km à pied, elle mêle les soins et les “exercices spirituels”, diffusant le message jésuite et promouvant la lecture et l’écriture auprès des populations indiennes.

Buenos Aires, l’étape finale 

En 1767, le choc survient avec l’ordre d’expulsion des Jésuites par le roi d’Espagne. “Mama Antula sent le vide spirituel et social chez les Indiens des missions (…) Cela la bouleverse”, explique sa biographe. Bien que non visée en tant que laïque par cet ordre, elle décide de poursuivre l’œuvre Jésuite.

“Après 20 ans et plus de 4.000 km parcourus à pied dans les provinces du nord, elle arrive à Buenos Aires, pieds nus, sandales détruites, sa cape de Jésuites en lambeaux, portant une croix en bois”, décrit Cintia Suarez.

À Buenos Aires, Mama Antula continue ses “Exercices spirituels” et attire des gens de toutes conditions. Elle y faisait des sessions méditation, prière, réflexion… Cela attirait des gens de toutes conditions.

Moquée et prise pour une sorcière 

Les gens “la prennent pour une sorcière ou une folle” à cause de son apparence dépenaillée, raconte Cintia Suarez, se basant sur les dires de l’époque.
“Des jeunes lui lancent des pierres et elle se réfugie dans une petite chapelle” où se
dresse aujourd’hui la Basilique de la Piété. Ses restes y reposent près d’une statue la représentant.

Raul Laurencena, prêtre de cette paroisse, assure que “l’affluence a augmenté ces derniers temps”, difficiles économiquement. “Les gens viennent prier pour du pain, du travail, pour la paix. Pour notre pays qui en a tant besoin”, dit-il.

Elle a formé des acteurs-clefs de l’indépendance, comme Manuel Belgrano et Miguel de Azcuenaga

Face a l’engouement, le vice-roi et l’évêque, au début hostiles, l’autorisaient à ouvrir une maison pour ces sessions. “Elle parvenait à y faire cohabiter en harmonie les classes sociales”, souligne Cintia Suarez. L’agence argentine d’informations catholique AICA avance que “le poids politique de Mama Antula a peut-être été plus fort que son impact religieux”.

Mama Antula, décède en 1799 à l’âge de 69 ans, et laisse un héritage indélébile. “Femme forte, comme on l’appelait à l’époque, Mama Antula était très courageuse, et rebelle au bon sens du terme”, résume sa biographe Cintia Suarez.

“Son message était très fort pour l’époque et inspire des femmes aujourd’hui encore. Il a pris de l’ampleur grâce à Jorge Bergoglio”, le pape actuel. Elle a formé des acteurs-clefs de l’indépendance, tels que Manuel Belgrano et Miguel de Azcuenaga, mais n’a pas vécu pour voir la future “Argentine”.

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