Festival de Cannes : parité dans le jury mais pas dans la sélection

AccueilCultureFestival de Cannes : parité dans le jury mais pas dans la...

Greta Gerwig, la réalisatrice de Barbie, est choisie pour présider le jury du festival de Cannes 2024. Elle sera entourée d’autres grandes figures féminines du cinéma telles que la scénariste turque Ebru Ceylan, l’actrice américaine Lily Gladstone, l’actrice française Eva Green et la réalisatrice et scénariste libanaise Nadine Labaki. Dans ce jury, il y aura cinq femmes et quatre hommes, avec l’actrice Camille Cottin qui sera la maîtresse de cérémonie.

Sur les 22 films en lice pour la Palme d’Or, 4 ont été réalisé par des femmes :

“Bird” d’Andrea Arnold

Double actualité pour la cinéaste britannique. Réputée pour dynamiter les films sociaux, elle recevra le Carrosse d’or, sacrant chaque année à Cannes un réalisateur/réalisatrice faisant preuve d’audace et d’innovation. Et Andrea Arnold présentera son nouvel opus porté par le duo Barry Keoghan et Franz Rogowski.

“The substance” de Coralie Fargeat

La Française qui avait réalisé le bien nommé “Revenge” en 2018 orchestre le retour au premier plan de Demi Moore pour un film gore assumé, avec beaucoup de sang sur l’écran, nous promet-on.

“All we imagine as light” de Payal Kapadia

La réalisatrice filme les désirs de deux femmes en Inde dont une infirmière de Bombay empêtrée dans un mariage arrangé.

“Diamant Brut” d’Agathe Riedinger

Premier film de la Française, sur les rêves et utopies d’une adolescente sous le soleil poussiéreux de Fréjus (sud de la France), perdue dans les méandres des réseaux sociaux.

Le festival, moins paritaire que l’an passé sur la sélection

Le festival est un peu moins paritaire que l’an dernier où sur les 21 films en lice, 7 étaient réalisés par des femmes, soit environ 33 % des cinéastes en lice, une première. En 2022, elles étaient cinq à prétendre à la Palme d’Or.

« On se réjouit de ce nombre de réalisatrices en compétition, mais on s’inquiète aussi, car force est de constater que ça avance trop lentement », soulignait Clémentine Charlemaine du collectif 50/50 (spécialisé dans la question de la parité au cinéma) et déléguée générale de l’association Cinéma pour tous.

« Même si la parité n’est pas encore là, on constate quand même que la programmation du festival de Cannes va plus loin que la production de films réalisés par des femmes », retient pour sa part Fabienne Silvestre, cofondatrice et directrice du « Lab femmes de cinéma », un cercle de réflexion sur la place des femmes dans le cinéma en Europe.

Objectif, dépasser le nombre de 7 réalisatrices en sélection

Selon les statistiques de l’Observatoire européen de l’audiovisuel, reprises par Le lab des femmes, la proportion de réalisatrices dans le domaine du long métrage (fiction) en Europe sur la période 2017-2021 s’établit à 21 %.
La question de la parité n’est pas un défi uniquement pour le festival de Cannes. La Berlinale, qui publie depuis 2002 ses statistiques, semble aussi avoir du mal à dépasser le nombre de sept réalisatrices en compétition, son record. Malgré cela, l’on note une évolution par rapport à 2002 où, un seul film d’une réalisatrice, sur 21, était en compétition. En 2023, elles étaient six cinéastes femmes à concourir pour l’Ours d’or, sur 19 films.

À Venise, sur 23 films en lice pour le Lion d’or en 2022, huit étaient l’œuvre de réalisatrices. En 2012, à Cannes, aucune réalisatrice n’était en compétition.

Les réalisatrices “cantonnées aux petits budgets”

En tout, seules deux femmes ont obtenu la Palme d’or : la Française Julia Ducournau en 2021 avec « Titane » et la Néo-Zélandaise Jane Campion ex-aequo en 1993 avec « La leçon de piano ». À Venise, les trois derniers Lions d’or ont été décernés à des réalisatrices : Chloé Zhao («Nomadland » en 2020), Audrey Diwan («L’Événement » en 2021) et Laura Poitras («Toute la beauté et le sang versé » en 2022).

Comment expliquer qu’année après année la parité semble inaccessible, alors même qu’un étudiant sur deux dans les principales écoles de cinéma est une femme ? « Les femmes ont plus de mal à se projeter dans une carrière longue au cinéma. Il y a un problème de représentativité avec peu de réalisatrices à la carrière longue mais aussi la question de l’argent. Demander de grosses sommes d’argent est quelque chose de difficile », énumère Fabienne Silvestre.

Ainsi, souligne Clémentine Charlemaine, « les réalisatrices sont cantonnées aux petits budgets : plus des trois-quarts d’entre elles disposent d’un budget inférieur à 4 millions d’euros », selon l’étude réalisée par le collectif 50/50.

“Les quotas ne séduisent toujours pas”

« Les festivals mettent en lumière ces questions (genre et diversité, ndlr) mais les problèmes structurels demeurent. Les producteurs noirs ont du mal à accéder à la communauté des investisseurs », assurait l’avocate Heather Rabbatts.

Comment, alors, faire mieux ? « Les quotas ne séduisent toujours pas, même si deux pays expérimentent depuis 2021 une forme de quotas hybrides », expose Fabienne Silvestre. Certains pays comme l’Autriche, met en place des quotas, mais sans sanction s’ils ne sont pas respectés. Le Royaume-Uni aussi, a renforcé ses objectifs chiffrés.

Lire aussi : Oscars: Justine Triet obtient cinq nominations pour “Anatomie d’une chute”

Découvrez aussi