“Déborder l’anthropologie” : une exposition inédite révèle des militantes noires oubliées

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Avant la renommée de Martin Luther King, d’Angela Davis, ou de Black Panther, d’autres ont fait l’histoire afro-américaine. À Paris, une exposition remet en lumière trois femmes oubliées depuis les années 1930 qui ont œuvré pour une “internationale noire”.

Des figures méconnues de l’histoire politique américaine

Katherine Dunham (1909-2006), Zora Neale Hurston (1891-1960), et Eslanda Robeson (1895-1965), bien que peu connues du grand public, ont laissé leur empreinte dans l’histoire politique des États-Unis.

“Pour parler franchement, chacune aurait mérité sa propre exposition”, déclare Sarah Frioux-Salgas, commissaire de “Déborder l’anthropologie”, une exposition actuellement au quai Branly à Paris.

L’exposition, bien que son titre puisse sembler aride, offre une expérience didactique et efficace, mettant en lumière des trésors d’archives sonores et visuelles conservés à la Bibliothèque du Congrès américain à Washington.

L’objectif de l’exposition est de documenter le parcours de ces trois femmes qui ont remis en question les stéréotypes raciaux de leur époque et de répondre à une question cruciale : d’où vient l’identité afro-américaine ?

Les années 30 dans l’histoire afro-américaine

Selon Sarah Frioux-Salgas, les années 30 ont marqué une période fondamentale dans l’histoire intellectuelle afro-américaine, où l’on “commence à réfléchir au lien avec l’Afrique et les Caraïbes”.

Il s’agit d’une période fondamentale dans le combat pour les droits civiques qui reste souvent dans l’ombre de celle des années 50 et 60, souligne l’historienne Pauline Peretz.

Pour les trois militantes, la quête des origines a débuté par l’étude de l’anthropologie à l’université, cherchant à comprendre les traits d’une culture de la diaspora noire pour ensuite la valoriser artistiquement.

Zora Neale Hurston : Une étude du Sud des États-Unis 

Zora Neale Hurston, l’écrivaine dont le livre féministe “Une femme noire” (republié en français en 2018) a été salué par Toni Morrison, prix Nobel de littérature, a réalisé une étude approfondie du Sud des États-Unis, en particulier de la ville d’Eatonville (Floride), où elle a grandi.

Durant la visite on découvre des vidéos qu’elle a tournées auprès d’ouvriers agricoles mais aussi des chants traditionnels enregistrés par Alan Lomax.

Katherine Dunham : La chorégraphe qui a étudié les danses traditionnelles

La chorégraphe Katherine Dunham s’est déplacée sur le terrain, explorant les danses traditionnelles dans les Antilles et les Caraïbes, avant de fonder la première compagnie afro-américaine de danse contemporaine, la Katherine Dunham Company.

Elle fondera ensuite la Katherine Dunham Company, première compagnie afro-
américaine de danse contemporaine.

Eslanda Robeson : Engagée politiquement dans les mouvements de décolonisation en Afrique

Eslanda Robeson, plus politique, a étudié à Londres avant de partir à la découverte du continent africain, s’impliquant dans les mouvements de décolonisation. “C’est quelqu’un qui a épousé toutes les luttes”, souligne Sarah Frioux-Salgas, qui raconte avoir découvert cette militante après avoir consacré une exposition à son
époux, l’acteur et chanteur Paul Robeson.

“Les trois ont été engagées politiquement”, soutient Sarah Frioux-Salgas, rappelant
que Katherine Dunham refusait de danser devant une salle qui pratiquait la ségrégation
raciale.

“On est face à trois femmes exceptionnelles”, estime Pauline Peretz, tout en soulignant que l’élite intellectuelle à laquelle elles appartenaient représentait une part “infime” de la population noire américaine de leur époque.

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