Sarah Mullally, première femme à la tête de l’Église anglicane : une nomination qui divise

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Loïs Boumal

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La nomination de Sarah Mullally comme archevêque de Canterbury, première femme à occuper cette fonction, est saluée comme une avancée historique au Royaume-Uni. Mais en Afrique, et particulièrement en Ouganda, elle est perçue comme une trahison des valeurs anglicanes traditionnelles.

Une femme à la tête de l’Église d’Angleterre

À 63 ans, l’évêque de Londres Sarah Mullally devient la cheffe spirituelle de la Communion anglicane mondiale. Féministe assumée, elle a soutenu la décision de l’Église d’Angleterre d’autoriser en 2023 la bénédiction des unions entre personnes de même sexe. Sa nomination, vendredi, marque une étape inédite dans l’histoire religieuse britannique mais ravive aussi de profondes divisions au sein du monde anglican.

Depuis plus de vingt ans, les Églises d’Afrique et celles du Royaume-Uni s’opposent sur les questions de genre et de sexualité. Ces tensions ont atteint un point culminant en 2023, lorsque l’Ouganda a adopté l’une des lois anti-homosexualité les plus répressives au monde, soutenue par le clergé local mais condamnée à Londres.

« Une triste nouvelle » pour l’Église ougandaise

Dans une lettre lue par l’AFP, l’archevêque de l’Église anglicane ougandaise, Stephen Samuel Kaziimba Mugalu, a exprimé sa « tristesse » face à la nomination de Sarah Mullally, qu’il juge révélatrice « de son éloignement des positions anglicanes historiques ».

« Son soutien et plaidoyer en faveur de positions non bibliques sur la sexualité et le mariage homosexuel (…) révèlent son éloignement des positions anglicanes historiques. L’archevêque a estimé que « la déchirure dans le tissu de la communauté anglicane a maintenant atteint le plus haut niveau », accusant l’Église d’Angleterre d’avoir pris « une mesure grave » en se séparant « de la grande majorité de la communauté anglicane mondiale ».

Depuis 2023, l’Église ougandaise et d’autres branches conservatrices du mouvement, réunies au sein de la Gafcon (Global Anglican Future Conference), « ne reconnaissent plus l’archevêque de Canterbury comme ayant une autorité mondiale ».

« Avec cette nomination, l’archevêque de Canterbury est réduit simplement au rôle de Primat de toute l’Angleterre », a poursuivi Mgr Kaziimba Mugalu.

Des fractures toujours coloniales

La Gafcon, qui regroupe plusieurs Églises anglicanes d’Afrique et d’Asie, a elle aussi dénoncé la nomination de Sarah Mullally, estimant qu’elle « divisera davantage une communauté déjà fracturée ».

« Bien que certaines personnes accueilleront favorablement la décision de nommer l’évêque Mullally comme première femme archevêque de Canterbury, la majorité de la Communion anglicane croit encore que la Bible exige un épiscopat exclusivement masculin. »

Ces divisions s’enracinent aussi dans un ressentiment postcolonial. En 2023, alors que son prédécesseur Justin Welby critiquait la loi anti-homosexualité ougandaise, Laurent Mbanda, archevêque du Rwanda et dirigeant de la Gafcon, lui avait rétorqué : « Il semble que l’histoire de la colonisation et du comportement condescendant de certaines provinces de l’hémisphère Nord envers le Sud, et l’Afrique en particulier, n’est pas encore terminée. »

Ainsi, derrière la figure d’une femme brisant un plafond de verre religieux, c’est tout l’équilibre fragile d’une communion mondiale qui vacille entre modernisation, conservatisme et mémoire coloniale.

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