La cour d’assises du Gard a condamné jeudi Husamettin Dogan à dix ans de réclusion criminelle pour viols sur Gisèle Pelicot, ne confirmant pas les réquisitions de l’avocat général Dominique Sié qui demandait 12 ans.
Seul des cinquante hommes condamnés dans l’affaire dite des “viols de Mazan” à avoir fait appel, cet ancien ouvrier de 44 ans voit sa peine alourdie de trois ans par rapport à la première instance, où il avait écopé de neuf ans de prison à Avignon.
Un homme dans le déni
Tout au long du procès en appel, Husamettin Dogan a persisté à nier les faits.
Reconnu coupable d’avoir violé Gisèle Pélicot alors qu’elle était inconsciente, il a maintenu qu’il pensait participer à une relation “libertine” consentie.
« S’il m’avait dit : “Viens, je vais te filmer, on va la violer”, je ne serais jamais allé là-bas », a-t-il déclaré à la barre, répétant qu’il avait été manipulé par Dominique Pélicot, le mari de la victime, condamné en 2024 à vingt ans de réclusion pour avoir drogué sa femme et organisé les viols collectifs.
Le jury n’a pas été convaincu.
Les vidéos diffusées à l’audience ont montré Gisele Pélicot, inerte, droguée à son insu, pendant que Dogan la pénètre sans qu’elle ne réagisse.
Des images qualifiées de « glaçantes » par plusieurs observateurs.
Un réquisitoire sans concession
L’avocat général Dominique Sié a dénoncé avec force le déni persistant de l’accusé.
« Vous avez participé à une œuvre de destruction massive d’une femme livrée en pâture », a-t-il lancé dans un réquisitoire jugé d’une intensité rare.
« Tant que vous refuserez de l’admettre, ce n’est pas seulement une femme que vous humiliez, c’est toute une société que vous cautionnez. »
Le magistrat a parlé d’un homme « prisonnier d’une pensée d’un autre âge », incapable de reconnaître la gravité de ses actes.
Il a appelé à un changement profond des mentalités :
« Il reste à faire évoluer, pour vous et pour la société, la culture du viol en culture du consentement. »
Le procureur a insisté sur la responsabilité individuelle de Dogan, rappelant que « le consentement ne se délègue pas, ne se suppose pas, et encore moins ne s’achète ».
Une attitude jugée “désespérante”
Selon plusieurs témoins de l’audience, Husamettin Dogan est resté impassible tout au long des débats, adoptant une posture de victime et répétant qu’il n’avait “jamais eu l’intention de violer”.
Une attitude jugée “désespérante” par le parquet.
Pour l’avocat général, ce procès est celui d’un homme qui refuse d’affronter la réalité :
« On ne peut pas, en 2025, considérer que parce qu’elle n’a rien dit, elle était d’accord. Car là, on se situe dans un mode de pensée d’un autre âge. »
Les avocats de la partie civile, Me Antoine Camus et Me Babonneau, ont insisté sur l’importance de ce verdict pour la reconnaissance des victimes.
« Une victime endormie, on n’y touche pas », a rappelé Me Camus, soulignant que ce dossier a contribué à faire évoluer la loi sur le consentement en France.
“J’ai honte pour vous”
À la fin de l’audience, Gisèle Pelicot s’est adressée directement à l’accusé.
« À quel moment je vous ai donné mon consentement ? Jamais. J’ai honte pour vous », a-t-elle déclaré d’une voix ferme.
Dans la salle, le silence était total.
Le jury, composé de cinq hommes, quatre femmes et trois magistrats, n’ont pas suivi les réquisitions du parquet qui étaient de 12 ans.
Verdict : 10 ans de réclusion criminelle.
Ce jugement clôt l’un des volets les plus emblématiques du procès de Mazan, devenu un symbole de la lutte contre la soumission chimique et de la reconnaissance du non- consentement comme fondement du droit.