La Ciivise 2, commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles envers les enfants, est déjà fragilisée avec l’annonce de la mise en retrait de sa vice-présidente, Caroline Rey-Salmon, confrontée à une plainte pour agression sexuelle.
La Ciivise souhaite maintenir « la confiance » des personnes victimes
« La vice-présidente se met en retrait total des travaux de la commission pendant tout le temps de l’enquête », « indispensable à la sérénité des travaux » et au maintien « de la confiance » des personnes victimes, explique la Civiise dans un communiqué. Le président de l’instance, Sébastien Boueilh, souligne l’importance de maintenir la Ciivise comme un espace protégé pour la parole des victimes d’inceste ou de violences sexuelles.
« La Ciivise doit impérativement demeurer un espace d’accueil privilégié et protégé pour la parole des personnes victimes », ajoute le président de l’instance Sébastien Boueilh, réaffirmant « son soutien absolu à toutes les personnes qui ont été victimes d’inceste ou de violences sexuelles pendant leur enfance. »
« Elle a posé ses doigts sur moi »
La pédiatre et médecin légiste Caroline Rey-Salmon fait face à une plainte pour « agression sexuelle par personne abusant de l’autorité que lui confère sa fonction. » Selon le récit de la plaignante de 25 ans, l’agression aurait eu lieu lors d’un examen gynécologique à l’Hôtel-Dieu à Paris en juin 2020, dans le cadre d’une enquête judiciaire portant sur des viols subis pendant l’enfance entre 2004 et 2009.
« Elle m’a auscultée, elle m’a dit qu’il n’y avait absolument aucune trace et que je me trompais parce qu’une enfant victime de viol vaginal avait forcément l’hymen déchiré, ce qui n’était pas mon cas, » déclare-t-elle à l’AFP.
« Elle m’a dit qu’il avait dû se frotter, elle a posé ses doigts sur moi, a fait des mouvements de va-et-vient, m’a dit de fermer les yeux et d’imaginer que c’était le pénis de l’agresseur afin de me souvenir » a-t-elle ajouté.
Sollicitée par l’AFP, Caroline Rey-Salmon n’a pas donné suite. Invité mardi soir dans l’émission « Quotidien » sur TMC, Sébastien Boueilh avait indiqué lui apporter son « soutien ». « Si la victime a porté plainte, tant mieux, je pense que Caroline le fera aussi et la justice tranchera », ajoute-t-il.
Aurore Bergé met en garde contre le risque de « discrédit » de la Ciivise
Sollicitée par l’AFP, Caroline Rey-Salmon n’a pas répondu. Dans une déclaration sur l’émission « Quotidien » sur TMC, Sébastien Boueilh exprime son soutien et affirme que la justice tranchera. La ministre Aurore Bergé met en garde contre le risque de « discrédit » de la Ciivise et insiste sur l’importance de préserver cet outil crucial pour les témoignages des survivants.
« Ce que je ne veux pas, c’est que la Ciivise soit abîmée alors que ça a été un outil
extrêmement important pour permettre à des milliers et des milliers d’enfants devenus des adultes de pouvoir témoigner », a-t-elle dit sur Europe1/CNews.
Le renouvellement de l’équipe dirigeante avait suscité des polémiques
Lancée en mars 2021, cette commission, présidée par le juge pour enfants Edouard Durand et la responsable associative Nathalie Mathieu, avait recueilli près de 30 000 témoignages et émis 82 recommandations. L’annonce du dépôt de plainte survient après la reprise des travaux de la Ciivise, dont le renouvellement de l’équipe dirigeante avait suscité des polémiques à l’automne.
Devant la mobilisation de nombreux élus, personnalités et associations, qui
réclamaient sa prolongation et le maintien du juge Durand, l’exécutif a prolongé la Commission mais en changeant la direction.
La nomination de Caroline Rey-Salmon en tant que vice-présidente avait déjà créé des tensions. « Voir la nomination de Caroline Rey-Salmon »; en tant que vice-présidente de la Ciivise, « c’était trop pour moi », déclare la jeune femme à l’origine de la plainte.
Une ancienne vice-présidence tout aussi problématique
Arnaud Gallais, ex-membre de la Ciivise, juge « indispensable » la mise en retrait de la vice-présidente. « Bien sûr, il y a la présomption d’innocence, mais il y a un principe de précaution », avait-il déclaré à l’AFP. « On ne peut pas dire ‘je te crois je te protège’ et là dire ‘je te crois mais si c’est la vice-présidente ça ne marche pas' ».
En décembre 2020, la Ciivise avait connu des difficultés avec une présidence confiée à Elisabeth Guigou, ex-garde des Sceaux, qui avait finalement renoncé à sa mission car jugée proche d’Olivier Duhamel, à l’époque accusé de viols incestueux par sa belle-fille Camille Kouchner.
Lire aussi : Gérard Miller : le psychanalyste accusé d’agressions sexuelles et d’un viol