The Women’s Voices reçoit Fanny Benedetti, directrice exécutive d’ONU Femme France

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Cynthia Illouz, fondatrice de The Women’s Voices, reçoit Fanny Benedetti, directrice exécutive d’ONU Femme France, pour évoquer l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes. Fanny Benedetti présente les différentes actions d’ONU Femmes et notamment les initiatives HeforShe ou Génération Égalité.

ONU Femmes France est une association créée en 2013, en France, sous égide de l’ONU. Sa mission est d’œuvrer pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes. ONU Femmes France organise de nombreuses actions comme HeForShe ou Orange Day, et a Génération Égalité.

Avant de revenir en détail sur ces programmes, pouvez-vous nous rappeler pourquoi l’ONU a créé une branche qui se focalise sur les droits des femmes ?

ONU Femmes a été créé il y a seulement dix ans, ce qui à l’échelle des Nations Unies est vraiment très récent. On peut effectivement se poser la question « pourquoi une agence dédiée à l’égalité ? », et surtout « pourquoi si tard ? ». Il existait auparavant des entités, je dirais « distinctes et un peu disparates » au sein de l’écosystème onusien qui est très large. La volonté des États s’est manifestée au fil de l’eau, de pouvoir regrouper ces différentes entités, pour donner une impulsion politique beaucoup plus forte aux Nations Unies sur cette thématique très importante qui est au coeur de la Charte des Nations Unies, car l’égalité des sexes y est inscrite, mais insuffisamment traitée à tous les niveaux puisqu’il n’y avait pas d’entité pilote, c’est donc devenu nécessaire.

 

On s’est bien sûr rendu compte de cette nécessité de longue date, mais elle est devenue de plus en plus impérieuse, puisque à partir de l’année 2000, on avait une véritable feuille de route : les objectifs du millénaire pour le développement. Là, on était vraiment en capacité d’avoir un suivi qualitatif et quantitatif de l’évolution des enjeux de l’agilité dans le monde ; et il est devenu évident que ce domaine avançait trop lentement, non seulement en soi, mais il retardait les avancées en matière de développement au niveau global. Et donc l’impulsion politique et la nécessité de mettre plus de moyens au service de cette cause est née de cela, de la mise en place de cette feuille de route au début des années 2000.

Quelles sont les problématiques particulières que traite l’ONU Femmes en France ?

ONU Femmes France est un acteur local, qui fait partie de la scène associative nationale. Notre première mission a pour mandat de faire connaitre ONU Femmes, qui est une entité très récente, pas assez connue du grand public. Et puis, nous cherchons à sensibiliser vraiment le grand public, les citoyens et les citoyennes au sens large sur ces enjeux de l’égalité. Nous le faisons à travers des campagnes internationales existantes, que nous adaptons au contexte national. Ce sont des campagnes qui ont pour objectif de mobiliser sur les inégalités présentes dans la société, à la fois au plan global comme le thème récurrent des violences faites aux femmes et aux filles, décliné chaque année à travers une campagne intitulée Orangez le monde, et qui vise à mettre la lumière sur cette problématique. Il y a également la thématique de Génération Égalité, qui est un passage de relais à la nouvelle génération, pour se battre sur les enjeux de l’agilité femmes-hommes. Et pour signifier que nous sommes loin du compte, puisqu’il faudra plus d’un siècle pour espérer atteindre l’égalité réelle. Cette année nous déclinons des temps forts en ce sens.
Il y a également le grand mouvement HeForShe, qui vise à engager les garçons et les hommes dans le combat pour l’égalité de genre. Cette campagne décline tout au long de l’année est aussi un temps fort de l’année pour ONU Femmes France, en particulier à la rentrée, où l’on essaye de mobiliser la jeunesse et les étudiants, qui ont d’ailleurs créé de nombreuses associations HeForShe en France.

Comment mobilisez-vous ces jeunes et ces hommes, dont des patrons me semble-t-il : est-ce facile ou difficile ?

Ce n’est pas très facile car il y a d’abord un travail pour que les hommes se sentent autorisés à se manifester sur ce sujet. Il s’agit vraiment d’un travail de fond, qui en est à ses débuts je pense. On se sert donc de rôles modèles pour cela, il est important d’avoir des rôles modèles dans toutes les sphères de la société. À partir du moment où ces rôles modèles sont visibles et se manifestent, prenant la parole, expriment leur vision de l’égalité, on a un levier poussant pour engager les jeunes, les garçons, les hommes dans ce combat de l’égalité.

Pourquoi les hommes ne se sentent-ils pas légitimes dans ce combat pour l’égalité : est-ce le poids du patriarcat qui pèse aussi sur leurs épaules ?

Exactement. Je pense que les garçons et les hommes souffrent également du patriarcat, et des rôles genres que leur impose la société. Mais ils n’en ont pas toujours conscience, ou très peu. Il y a aussi un manque de mobilisation concrète : entre exprimer son accord et devenir acteur, il y a un grand pas à franchir. Et c’est en cela que nous souhaitons accompagner le grand public, en ciblant en particulier la jeunesse, pour qu’ils puissent avoir un impact sur l’évolution des mentalités à moyen ou à court terme je l’espère.

Génération Égalité se décline sous plusieurs formes, avec un festival, un forum co-présidé par le gouvernement français et le gouvernement mexicain : pourquoi cette initiative, et quels en sont les temps forts ?

La Génération Égalité, c’est d’abord un anniversaire d’un très grand moment dans l’histoire du droit des femmes au niveau mondial : une grande conférence qui s’est tenue à Pékin en 1995, et qui a donné naissance à une feuille de route mondiale sur l’égalité, qui s’appelle « le programme d’action de Pékin ». Cet événement diplomatique était accompagné par une manifestation très importante de plus de 30 000 femmes et militantes féministes du monde entier, qui se sont réunies en parallèle, et qui ont montré au monde l’importance du sujet, et surtout la solidité de la base qui porte ces enjeux, avec les femmes de terrain mobilisées partout dans le monde. C’est un anniversaire que l’ONU, et en particulier l’ONU Femmes ne pouvaient laisser passer. On a eu de grandes difficultés d’ordre diplomatique pour faire avancer les droits et les faire respecter, pour que les États tiennent leurs engagements sur le sujet. Il était donc devenu nécessaire 25 ans plus tard de marquer le coup, de faire en sorte que, selon les mots de la directrice exécutive d’ONU femmes Phumzile Mlambo-Ngcuka, il y ait une démonstration de force (« a show of force » en anglais) de ce mouvement féministe mondial pour remettre la lumière sur les avancées et sur le chemin restant à parcourir, et remobiliser ; et aussi pour – toujours selon ses termes – « push back against the push back  », c’est-à-dire montrer la force de ce mouvement afin que les résistances ne prennent pas le dessus, et que surtout l’on continue d’avancer. Voilà pour le contexte géo-politique et diplomatique.
Cet anniversaire vise donc à aller de l’avant, à accélérer les progrès, pour atteindre les nouveaux objectifs des Nations Unies du développement durable : on a donc jusqu’à 2030 pour atteindre les objectifs qu’on s’est fixés, à condition encore une fois que les progrès s’accélèrent très fortement.
L’objectif global de cette campagne est donc d’engager la jeunesse et toutes les parties prenantes – les entreprises, les gouvernements les plus allants. On se resserra au tour des États « lead », les plus avancés et les plus mobilisés, et l’on sort un peu du cadre restreint des Nations Unies – où l’on piétine un peu face à des forces de résistance – pour remobiliser la société au sens large, et atteindre la génération des 15-25 ans, qui veulent l’égalité, et qui, on l’espère, l’obtiendront au cours de leur existence.

Comment s’organise le festival de Génération Égalité ?

En France, nous organisations une sorte de déclinaison locale de Génération Égalité. C’est une manifestation qui vise à mettre la lumière sur les initiatives les plus locales possibles sur tout le territoire national : des initiatives associatives, mais aussi individuelles, qui démontrent à tout un chacun que dans le domaine de la culture, du sport, et tous les domaines de la vie citoyenne, on peut s’engager et mener des actions significatives en faveur de l’égalité de genre. Il y a par exemple des compétitions mixtes qui visent à montrer la place des filles dans le sport, il y a des podcasts et des blogs sur l’égalité de genre…Et cette année nous sommes en mesure de remettre des prix pour les lauréats du festival dans les différents domaines.

S’agissant du Forum, pourquoi cette association entre le Mexique et la France ?

Il a fallu trouver des états partenaires de ce grand événement — c’était avant la pandémie donc nous pension pouvoir faire cela en présentiel, avec ce grand rassemblement mondial. La France a manifesté son intérêt – signe de sa forte présence dans les enceintes diplomatiques pour porter l’égalité, ainsi que le Mexique. C’est un partenariat hybride, de format inédit. Les entreprises notamment, sont partenaires des coalitions d’action sur 6 thématiques, et la société civile sur 6 grands thèmes de l’égalité, autour desquels on se fixe un agenda à 5 ans avec des résultats précis.
La société civile joue là un rôle essentiel : permettre aux citoyens et aux associations de s’impliquer dans le suivi des engagements, faire qu’ils se réalisent et soient impactants.

Quelles sont les coalitions pour ce Forum ?

Elles s’articulent autour de 6 grandes thématiques : les violences de genre envers les femmes et les filles en particulier, l’accès des femmes à la justice et aux droits économiques, les droits sexuels et reproductifs (un thème fondateur qui inclut notamment le droit à la contraception et à l’avortement), l’action féminine pour la justice climatique (les femmes et les filles sont les premières victimes du climat, et peuvent être en même temps les actrices de la transition), la technologie et l’innovation (où les femmes sont peu présentes), et enfin mouvements et leadership féministes, car les associations de femmes sont au cœur des avancées, et doivent avoir les moyens d’agir.

Un certain nombre d’entreprises vous accompagnent sur ces coalitions : quelles sont-elles ?

Il y a des groupes multinationaux comme BNP Paribas, Chloé, la Fondation Chanel, Corian, des géants mondiaux comme Microsoft et une myriade de petites entreprises.

Comment agir au quotidien à vos côtés ?

Nous avons effectivement besoin de soutien. Il y a plusieurs façons de le faire, déjà en rejoignant l’association bien sûr : les membre sont notre base de soutien, et nous en accueillons de nouveaux toute l’année). Un de nos mandats importants est aussi de contribuer financièrement aux programmes d’ONU Femmes dans le monde, donc nous collectons les dons des particuliers, qui sont reversés dans les programmes des 110 pays où ONU Femmes opère.
Vous pouvez également participer à nos grands événements, en devenant acteur des campagnes que j’évoquais précédemment, au niveau individuel.

#5000VOICES est une initiative rendue possible grâce à nos partenaires Engie, Accor, La Fondation RAJA, Aurel Bgc, Veolia et Mastercard.

Vous pouvez retrouver l’intégralité de l’entretien en podcast sur les différentes plateformes. N’hésitez pas à vous abonner et à nous laisser des étoiles !

Écoutez le podcast sur Spotify :
https://open.spotify.com/episode/3oAWvGAwsd75Outq9PWnJd

Écoutez le podcast sur Soundcloud :
https://soundcloud.com/thewomensvoicesbycharit/the-womens-voices-episode-5-avec-fanny-benedetti-directrice-executive-donu-femme-france

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