Égalité professionnelle : “les instances publiques et privées doivent mettre plus d’argent”, Barbara Sessa

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Sur invitation de Xavier Iacovelli, sénateur des Hauts-de-Seine, Barbara Sessa, Vice-présidente de Mastercard et Cynthia Illouz, fondatrice de The Women’s Voices organisaient une discussion sur l’égalité professionnelle avec d’autres femmes expertes engagées en faveur de l’égalité femmes/hommes dans leurs entreprises.

En Europe, il y a « un écart de salaire de 24% avec les hommes »

“Partout en Europe, les femmes voient un écart de salaire moyen entre 13 et 15% avec les hommes, tout secteur confondu” explique Barbara Sessa, Senior vice-présidente Mastercard et responsable du réseau femmes. Elle détaille : “l’ensemble des instances publiques et privées doivent mettre plus d’argent pour les femmes”.

Barbara Sessa, vice-présidente (Mastercard), avec derrière elle, Xavier Iacovelli, sénateur des Hauts-de-Seine.

“Je travaille sur le bien-être financier, et c’est difficile de s’occuper de cela quand les femmes gagnent déjà plus de 15% de moins que les hommes” détaille Barbara Sessa, qui relève également un problème : “les entreprises ont des femmes et commencent à les perdre quand elles ont entre 30 et 40 ans”.

“Je suis persuadée que si on n’agit pas, on ne comblera jamais cet écart de salaire” explique Stéphanie Zolesio, CEO Casino Immobilier & FinTechs. “Je ne pense pas que le renouvellement des générations arrange à lui seul et spontanément les choses, c’est plutôt l’inverse”, explique-t-elle.

À droite, Stéphanie Zolesio, CEO Casino Immobilier & FinTechs, avec à sa gauche Céline Boudière, directrice marketing et digital de Meetic Europe.

Pour les femmes, “la vraie inégalité c’est le temps”

“La vraie inégalité c’est le temps” déclare Chiara Corazza, Membre du G7 Gender Equality Advisory Council (GEAC). “Les femmes en Europe travaillent deux mois de plus sans rémunération. Et surtout, les femmes sont obligées de choisir des métiers qui nous laissent le temps de faire autre chose. En Italie, par exemple, à peine 50% des femmes participent au marché du travail.”

À droite, Chiara Corazza, responsable pour l’égalité des genres au G7 et à gauche Claire Scharwatt, cheffe de la politique publique (Amazon).

À côté de cela, “les études montrent que les femmes sont plus engagées dans les moments informels au travail (cagnottes, événements…)” explique Karine Aubry, SVP personnes et développement durable chez Universal Music. “C’est du temps caché, en plus de leur travail, pour entretenir le collectif au niveau des équipes”.

Une Allemagne encore très sexiste au travail

C’est le cas en Allemagne, où “78% de la population qui travaillent à temps partiel sont des femmes” relève Katrin Gülden Le Maire, experte en gouvernance et éthique des affaires. De ce fait, ” c’est encore plus dur d’être une mère”. Chiara Corazza rappelle que dans un récent sondage dans les pays du G7, 53% des interviewés considèrent qu’une femme ne peut pas être une bonne mère et faire carrière.

Katrin Gülden Le Maire, experte en éthique des affaires.

En Europe, 60% des femmes de plus de 50 ans travaillent toujours, “en Allemagne, c’est seulement 47%, un chiffre qui comprend le travail à temps plein et en temps partiel” ajoute-t-elle. Cette large inégalité pourrait signifier selon l’experte, que la situation “deviendra très difficile à la retraite” par rapport à la pauvreté des femmes. Malgré le fait que les pays développés soient en progrès, l’égalité reste un même défi “en France, en Angleterre et en Allemagne”.

Une standardisation des initiatives RH dans les multinationales 

“La règle chez Mastercard c’est “Equal pay for equal job” précise Barbara Sessa. “Une autre règle dit que du moment où une position est ouverte, on ne peut pas valider les candidatures si on n’a pas le même nombre de femmes et d’hommes. Cette règle permet de ne pas sortir cette fameuse phrase: “Je n’ai pas trouvé de femmes” souligne la vice-présidente.

Même processus chez Carrefour banque, chez qui “l’ouverture d’un poste nécessite d’avoir une mixité : pour une candidature, il faut hommes et femmes pour prétendre au poste. Les femmes ne viennent pas spontanément candidater, cela nécessite que nous allons parfois les chercher” explique Orli Hazan, directrice générale de Carrefour banque pour qui “la culture est supérieure au processus et aux outils”.

Orli Hazan, directrice générale de Carrefour Banque, accompagnée sur sa droite de Karine Aubry, SVP people and sustainability chez Universal music, suivie d’Anne-Laure Thomas, directrice diversités (l’Oréal France).

De son côté, Amazon a développé une politique RH qui favorise la diversité :”Il ne faut pas croire aux bonnes intentions : il est nécessaire d’avoir des mécanismes très clairs. Nous déployons des formations pour sensibiliser aux biais conscients et inconscients. Nous formons également des “gardiens des biais”, qui doivent veiller à ce que l’on ne note pas mieux les hommes que les femmes afin de s’assurer que les recrutements et promotions soient les plus objectifs possibles” détaille Claire Scharwatt, cheffe de la politique publique de l’entreprise. 

« Les groupes internationaux sont en avance sur ces sujets de parité hommes/femmes car ils sont déjà intégrés dans leurs process et politique RH au niveau global », souligne Céline Boudière, directrice marketing et digital de Meetic Europe qui appartient à MatchGroup. Selon elle, l’enjeu est d’accompagner cette approche globale avec des engagements concrets au niveau de chaque pays pour nourrir les valeurs d’entreprise.

TechEquity et #StOpE, des dispositifs pour l’égalité en entreprise 

Un dispositif unique, TechEquity, a été mis en place : “Lors du G20 sous Présidence indienne en 2023, on a créé une plateforme en 120 langues, qui donne accès aux 2,5 milliards de filles et femmes du monde entier à des formations financières et aux STEM” explique Chiara Corazza, qui est également Représentante de la France pour le secteur privé au G20 EMPOWER. Cette initiative “permet d’augmenter le nombre de femmes, insuffisant, dans les métiers du futur et de réduire les écarts de salaire”.

L’éducation aux STEM est aussi un sujet important pour Mastercard qui a le programme Girls for Tech Mastercard, avec plus de 4 millions de jeunes filles formées dans 63 pays.

Anne-Laure Thomas, directrice diversités et inclusion chez L’Oréal France, est aussi une des fondatrices du collectif #StOpE (contre le sexisme dit ordinaire en entreprise) avec les entreprises EY et Accor. “Toutes les entreprises qui rejoignent le collectif s’engagent à mettre en place une action par an. Tous les trois mois, on partage nos bonnes pratiques” explique-t-elle.

“Il faut pousser les parlementaires à se saisir de l’égalité”

« Huit textes de lois ont été voté en 23 ans en France, il y a des avancées mais rien n’est jamais immédiat », précise Cynthia Illouz, fondatrice de The Women’s Voices. Malgré cela, “il y a encore cette vision très paternaliste et ancienne du droit des femmes au Sénat” explique le sénateur Xavier Iacovelli.

Xavier Iacovelli, sénateur des Hauts-de-Seine, accompagné de Claire Scharwatt, cheffe de la politique publique (Amazon)

“Il faut pousser les parlementaires à se saisir de l’égalité, notamment salariale” constate le sénateur qui questionne d’ailleurs les intervenantes en disant : “si vous vous demandez pourquoi un homme s’occupe du droit des femmes : c’est que pour moi c’est une question de droits humains et d’égalité”.

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