Joël Le Scouarnec : le chirurgien pédocriminel condamné à 20 ans de réclusion criminelle, avec deux tiers de sûreté

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La rédaction

Condamné mercredi à 20 ans de réclusion criminelle, dont une peine de sûreté des deux tiers, l’ex-chirurgien Joël Le Scouarnec a été reconnu coupable de viols et d’agressions sexuelles sur près de 300 victimes, en majorité mineures. Ce verdict marque l’épilogue d’un procès hors-norme, qui a levé le voile sur l’un des plus grands scandales pédocriminels en France.

20 ans de réclusion pour le chirurgien pédocriminel

Le verdict est tombé. Mercredi après-midi, la cour criminelle du Morbihan a condamné Joël Le Scouarnec, 74 ans, à la peine maximale : 20 ans de réclusion, assortie d’une période de sûreté couvrant les deux tiers de la peine. L’ancien chirurgien, accusé d’avoir commis des viols et agressions sexuelles sur 299 personnes, en majorité des enfants, entre 1989 et 2014, a reconnu l’ensemble des faits.

« À la cour, je ne sollicite aucune mansuétude. Accordez-moi simplement le droit de devenir meilleur et de reconquérir cette part d’humanité qui m’a tellement fait défaut », a déclaré Le Scouarnec lors de sa dernière prise de parole.

L’avocat général Stéphane Kellenberger avait requis cette peine maximale, accompagnée d’une rétention de sûreté – une mesure rare destinée aux criminels sexuels présentant un risque élevé de récidive. Ce dispositif, qui permet un internement à l’issue de la peine, est désormais entre les mains d’une juridiction spécialisée.

« Une bombe atomique de la pédophilie »

Pendant des années, Le Scouarnec a exercé dans divers hôpitaux du grand ouest de la France. Ses collègues le décrivaient comme un homme discret, compétent, sans rien de suspect. Cependant, ses pratiques et comportements ont révélé une tout autre réalité. En dehors des hôpitaux, il menait une vie d’isolement, accumulait des poupées et multipliait les actes sexuels avec elles, incluant des pratiques zoophiles, scatophiles et sadomasochistes. Ces déviances étaient dissimulées sous une façade de chirurgien respecté, et la plupart de ses collègues n’avaient émis aucun doute à son sujet.

Cependant, une perquisition en 2017 a dévoilé l’ampleur de ses actes : des milliers de photos et vidéos violentes ont été découvertes, ainsi que des carnets détaillant sa vie sexuelle obsessionnelle. « Il a eu envie, il a eu besoin de s’exprimer comme il l’a fait au cours de l’instruction », a déclaré son avocat, Me Thibaut Kurzawa, en référence à la personnalité atypique de son client.

Les débats, étalés sur trois mois depuis le 24 février, ont donné lieu à un choc judiciaire sans précédent. Soixante avocats de parties civiles ont plaidé, certains seuls, d’autres groupés autour de thématiques comme les défaillances institutionnelles ou les mécanismes de l’impunité médicale.

« Vous êtes le pire pédophile de masse qui ait jamais existé (…) la bombe atomique de la pédophilie », a lancé Me Thomas Delaby, résumant l’effroi suscité par l’ampleur des crimes.

Me Delphine Caro a fustigé une posture de pseudo-repentance : « Il nous a été martelé votre grande repentance, la grande sérénade de « j’ai changé ». Mais à qui ferez-vous croire que vous avez changé ? »

Si la défense a insisté sur la « volonté de réparation » de l’accusé, la plupart des avocats de victimes ont dénoncé une stratégie de reconnaissance de façade. « Reconnaître tout, c’est ne rien reconnaître », a ainsi résumé Me Giovanni Bertho-Briand.

Une peine saluée, mais insuffisante pour les victimes

Pour Manon Lemoine, violée à l’âge de 11 ans, la question de la rétention de sûreté reste déterminante : « Si (elle) n’est pas prononcée, c’est une honte », a-t-elle affirmé.

Son avocate, Me Marie Grimaud, a rappelé « le risque de dangerosité extrêmement important » de Le Scouarnec, espérant que la cour ne passe pas à côté de cet enjeu majeur.

L’un des avocats de la défense, Me Maxime Tessier, a pour sa part estimé que son client « ne demande pas à échapper à la peine requise par l’avocat général ». « Il a le droit à la repentance », a-t-il ajouté.

Une justice encore incomplète

Le procès de Vannes n’est peut-être que le début d’un long cycle judiciaire : « Il y aura probablement une autre procédure », a annoncé l’avocat général, évoquant des victimes encore non identifiées.

À 13h30, un collectif de victimes s’est rassemblé devant le tribunal judiciaire. Une rencontre avec le ministre de la Santé Yannick Neuder est prévue le 11 juin. M. Neuder a affirmé sur France Info : « Je vais agir avec le ministre de la Justice pour que plus jamais (…) on ne puisse se retrouver à avoir exposé des patients, des enfants vulnérables » à des « prédateurs sexuels ».

Il s’est engagé à « écouter » les victimes : une étape que beaucoup attendent, alors que le « silence politique » autour de cette affaire a été dénoncé par le collectif.

Outre le sort de l’accusé, ce procès a mis en lumière les failles systémiques qui ont permis à Joël Le Scouarnec d’agir si longtemps. L’impunité médicale, les silences institutionnels, les cloisonnements administratifs et l’absence de coordination entre les hôpitaux ont été dénoncés tout au long des audiences.

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