“Il y a encore trop peu de femmes freelance” : Caroline Mignaux, et Aline Bartoli, podcasteuses

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Aline Bartoli, fondatrice de J’peux pas, J’ai business et Caroline Mignaux, créatrice de Marketing Square, sont podcasteuses. À elles deux, elles ont enregistré plus de 300 podcasts et comptabilisent presque 75000 followers. Elles ont répondu aux questions de Cynthia Illouz, dans une interview Live réalisée en partenariat avec Brut. 

Caroline, pouvez-vous nous raconter l’histoire de Marketing Square?

Caroline : Quand j’étais auditrice je regrettais qu’il n’y ait que très peu de podcasts sur le marketing. En septembre, j’ai donc décidé d’arriver avec un épisode par jour. J’en ai fait 60 de suite, très courts : 10 à 20 minutes et avec des invités inconnus, donc complètement à rebrousse poil de ce que j’avais vu. Aujourd’hui, j’arrive à plus de 300 000 écoutes. Mais j’ai eu un petit coup de pouce du destin ! Apple Podcast m’a mise en avant en décembre dans les “coups de cœur de l’année”. Il y a eu un avant et un après. Le travail, mais aussi le facteur chance ! J’ai aussi diffusé sur d’autres plateformes comme LinkedIn. C’est un vrai boost aujourd’hui ! 

Comment réussir à donner des conseils en marketing quand on n’est pas professionnel de l’enseignement? 

Caroline : Je ne suis pas prof, par contre j’ai un peu la personnalité de la meilleure copine, je pense que c’est ça qui plaît. J’ai commencé à donner des conseils en disant “je ne suis pas prof, mais j’ai testé des choses et je vais te dire tout ce que je sais, sans compter.”. Les thèmes, ce sont les auditeurs qui me les donnent. En général, je transforme les commentaires que j’ai sur LinkedIn en épisodes. Et quand je vois des contenus qui méritent plus de lumière, j’invite ces personnes à venir faire un épisode de Marketing Square. C’est ma ligne éditoriale et c’est ça qui en fait un podcast un peu différent. 

Aline, comment s’est faite votre communauté sur J’peux pas, j’ai business?

Aline : Je me suis lancée dans le podcast complètement par hasard ! J’avais entendu dire que c’était sympa et qu’il y avait une place à prendre. J’ai commencé à raconter mes débuts d’entrepreneuriat : ce que je vivais au quotidien, ce qui marchait avec moi, ce qui ne marchait pas, ce que j’observais autour de moi; et à en faire des épisodes. Je me servais d’Instagram pour pousser le podcast. Petit à petit, la tendance s’est inversée. Aujourd’hui, les gens découvrent le podcast, puis me rejoignent sur Instagram ! 

Aujourd’hui je suis à plus de 230 épisodes enregistrés. Au début, c’était un épisode par semaine. J’étais à 35 000 téléchargements mensuels et je me demandais : pourquoi ne pas faire deux épisodes par semaine? J’ai gardé mon gros contenu du lundi, c’est celui où on vient chercher de l’information et des astuces. Et j’ai ajouté un deuxième petit contenu, le jeudi. En quelques minutes, je réponds à une croyance ou à une idée reçue que j’entends chez mes clients ou chez mes abonnés… A partir de ce moment-là, les écoutes du podcast ont décollé. Je suis aujourd’hui à 100 000 téléchargements. 

Caroline, que vous apporte ce podcast côté business? 

Caroline : Marketing Square est monétisé depuis janvier. L’idée, c’est de m’entourer des plateformes que j’utilise vraiment et de faire des partenariats. J’ai un sponsor qui me permet d’embaucher un monteur à temps plein, et de pouvoir sortir de nouveaux formats. C’est moi qui dis : “j’ai la chance d’avoir de la lumière, je veux la redistribuer”. Quand on fait du podcast, l’idée, n’est pas que de faire grossir notre audience. C’est aussi de savoir s’effacer devant ses invités pour servir les autres. C’est beaucoup de fierté d’avoir des auditeurs qui me disent “Je suis passé à l’action grâce à toi et ça marche.” 

Aline, votre podcast vous apporte une visibilité sur vos autres activités. Comment ça se passe? 

Aline : J’ai fait le choix de ne pas sponsoriser mon podcast. Pour moi, c’est vraiment le moyen d’acquérir une audience. On a cette possibilité aujourd’hui, de monétiser, en enregistrant des annonces ou en passant des des morceaux publicitaires. Moi, je fais la promotion de mes propres produits payants à la place de la pub d’un sponsor. C’est un circuit fermé. 

Vous avez choisi d’être 100% transparente sur l’ensemble de vos chiffres. Pourquoi une telle décision?

Aline : J’ai commencé à partager mes revenus en toute transparence, parce que personne ne le faisait et que ça m’a manqué quand je me suis lancée. Plus je partageais mes chiffres, plus les gens me disaient que ça les aidait. Avant, on avait tendance à beaucoup dire quand ça allait bien, quand on avait des victoires, quand le business progressait. Mais, très peu de personnes parlaient de quand ça va moins bien et des erreurs qu’ils ont faites. Alors que c’est là qu’on peut le plus apporter aux autres pour éviter qu’ils les reproduisent. 

Caroline : Je suis admirative de ce que fait Aline et de sa transparence. Personnellement, je me sens beaucoup moins à l’aise. Ça me fait très peur. Je trouve que ça ne rapporte pas grand-chose à mon business que de dire combien je gagne par mois. 

Comment fait-on pour faire grandir sa communauté sur les réseaux sociaux?

Aline : Monter une communauté, c’est la meilleure manière d’avoir un business “libre”. On ne dépend pas de la publicité ou d’un algorithme de plateforme. Personnellement, j’ai eu une croissance exponentielle : il m’a fallu trois mois pour atteindre 1000 abonnés, puis trois ans pour atteindre les 60, 000 !

Au début, c’est des stratégies classiques de contenu : poster, poster, poster pour un maximum de valeur ajoutée. Je suis très à l’écoute de ce que l’audience peut me demander en termes de conseils, d’astuces. Au début, c’était vraiment le contenu avant tout. J’ai mis presque deux mois à faire ma première story face caméra où les gens ont découvert mon visage. Ils ont alors arrêté de me demander “comment on fait?”, mais plutôt “comment toi tu as fait?”. Et là j’ai basculé sur ce côté personal branding où je me montre, je parle de moi, de mes expériences…

Caroline, quelle est votre relation avec votre communauté? 

Caroline : J’étais déjà dans le marketing, mais le marketing geek. J’ai toujours travaillé en pyjama ! (rires) Quand j’ai commencé à me mettre en avant, j’ai découvert les codes de l’image. Et les gens nous pardonnent de nous tromper. En fait, pour ceux qui nous écoutent et qui ont peur de se lancer : vous allez voir que juste vous lancer, ça va créer un jugement positif, même dans les moments où vous faites un pas de travers. C’est moins dur que dans la vraie vie. En plus on fait du contenu gratuit ! Donc il n’y a pas de pression. 

Par contre, ce qui est intéressant, c’est qu’on apprend beaucoup sur soi. Dans cet exercice, j’ai trouvé quelque chose de très vertueux : le regard des autres permets des retours sur soi-même. Tu comprends les moments où tu parles trop vite, les moments où tu t’effaces trop, c’est le fameux syndrome de l’imposteur ! On est des femmes, on comprend ça…

Vous êtes des femmes toutes les deux. Est ce que vous avez plus particulièrement des communautés féminines? 

Aline : Ma communauté est constituée à 80 % de femmes et dans les produits payants, c’est 95 % de femmes. Même si on est très contentes d’avoir des hommes, jamais, à aucun moment, je ne vais parler d’entrepreneuriat féminin. C’est l’entrepreneuriat tout court. Je n’ai pas vocation à parler uniquement aux femmes, mais de par le fait que je suis une femme, par mon branding et par ma communication, ma posture, ce que je peux partager, ça a forcément tendance à plus attirer les femmes, et j’en suis très contente. Certaines thématiques sont plus récurrentes chez les femmes : le syndrome de l’imposteur, le besoin de se sentir légitime… Elles sont beaucoup plus dans l’émotionnel par rapport à leurs clients, la manière de faire du business. 

Je ne me considère pas comme féministe et je ne suis pas très à l’aise avec ces questions parce que je n’ai aucune connaissance. J’aime être dans des milieux masculins, être la seule femme dans une pièce remplie d’hommes qui font du business. J’aime montrer qu’on peut être la seule femme dans cette pièce là, mais quand même leur clouer le bec. Et c’est arrivé plus d’une fois. (rires)

Le féminisme c’est l’égalité entre les femmes et les hommes. Vous vous pensez directement les surpasser. Mais c’est pas mal aussi !

Caroline : Moi je suis clairement féministe. Il y a un truc qui me tient très à cœur, c’est l’action. Comme Aline, je ne m’adresse pas qu’aux femmes. Par contre, il y a un instinct de sororité très fort chez moi et je sais qu’elles ont plus besoin . Donc j’aide plus les femmes, celles qui se lancent, les indépendantes. J’ai 60 % d’écoute d’hommes parce qu’il y a encore trop peu de femmes qui se sont lancées en freelance. 

Que peut-on vous souhaiter pour la suite?

aline: Je ne me fais pas de soucis pour moi, mais il faut oser lancer son projet. Que vous soyez un homme, une femme, allez-y !

Caroline: Le mot de la fin? Aujourd’hui il faut qu’on remette du positif, qu’on remette de la magie, de l’amour dans nos échanges, surtout dans le business ! Parfois, on a des discours un peu tristes, un peu vindicatifs. Et en fait, l’important, c’est d’apprendre. D’ailleurs, ce que je me souhaite pour cette année, c’est de continuer à mettre de l’énergie, à me tromper, à mettre de l’humilité, à laisser de la place aux autres et à aider les gens à se lancer. 

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